Z - DAYS 30 TO 32


Trois journées très maussades. Pas vraiment de crise, pas vraiment de panique, mais toujours cette quantité énorme de douleur qui fait douter de tout, de la possibilité de s'en sortir, de l'efficacité du Z, de la possibilité de se passer du R, de la possibilité de redresser la situation d'ici au début du mois de septembre.

Le R a toujours de l'effet, pour autant que je puisse dire, et s'avère quasiment indispensable le matin après le réveil systématiquement pénible. Ce matin, cependant, le réveil a été légèrement moins pénible que d'habitude et, fort logiquement, la matinée semble mieux se dérouler.

Hier, en revanche, la douleur était vive, l'angoisse était bien présente et la matinée a été particulièrement difficile. Je ne suis pas revenu complètement épuisé de la petite expédition pour chercher le journal avant le petit-déjeuner, mais la raideur de ma colonne vertébrale était suffisamment prononcée pour indiquer que le reste de la journée ne serait pas particulièrement agréable. Le calmant au petit-déjeuner n'a pas suffi à apaiser tout cela et le croissant frais, pourtant délicieux, a eu du mal à descendre. C'est difficile d'arriver à accepter, comme ça, cette dichotomie entre le corps qui souffre et qu'une bonne partie de l'esprit traîne comme un boulet et le reste de l'esprit qui a l'habitude, le souvenir des bonnes choses, qui est encore capable de les apprécier, mais qui est « étouffé » par le reste et qui ne peut se manifester que par petites bouffées d'un semblant de plaisir vite annulé par une nouvelle flambée de douleur. Le fait que cette petite partie de l'esprit soit encore là, se manifeste encore, même si faiblement, est évidemment un signe que tout n'est pas perdu, mais c'est difficile d'accepter qu'elle soit condamnée à jouer un si petit rôle alors même qu'on sait qu'il ne dépendrait de pas grand-chose qu'elle puisse en jouer un bien plus grand.

L'après-midi a été un peu plus calme, j'ai mis un texte en ligne avec deux images et puis le mal sourd et lourd a fait son retour en fin d'après-midi. Je me suis quand même occupé du repas, de quelques tâches ménagères, mais en me forçant, en essayant de prétendre que ça allait passer alors que ça ne passait pas. J'ai réussi à manger, deux petites côtelettes d'agneau au barbecue et des haricots verts aux fines herbes, j'ai bu un peu, mais je n'ai pas réussi à fini mon verre, que j'ai refilé à C., j'ai pris du dessert, ce délicieux gratin de pêches à la cannelle et au gingembre, mais j'en ai pris un peu trop, ou bien je n'aurai pas dû en prendre, en tout cas, j'ai senti que ça coinçait de nouveau, ça devait arriver, après tout ce mal pendant deux, trois heures, le repas ne pouvait pas miraculeusement tout effacer, j'ai quand même pris une tisane au citron, on a regardé un film québécois cette fois attendrissant et un peu envoûtant (L'homme à tout faire), mais aux deux-tiers du film, tout d'un coup, une vague m'a envahi de nouveau, vague de malaise, vague de panique, difficile à dire, je n'ai rien dit, j'ai continué à regarder le film, c'est passé un peu, j'en ai parlé à C. après le film, alors qu'on était dehors sur la terrasse à regarder les étoiles et la pleine lune, dans le calme le plus parfait, sans être chassés par les moustiques, avec notre chat qui se frottait à nos jambes, elle voulait savoir si ça allait, si j'arrivais à savourer ce moment, il a bien fallu que je lui dise, elle m'a demandé pourquoi je ne le lui ai pas dit sur le coup, je lui ai dit que c'était inutile, que des vagues de malaise, de panique comme celle-ci, j'en ai eu et j'en aurai encore, il faut juste espérer que, comme celle-ci, elles n'atteindront pas un niveau m'obligeant à dire, à faire quelque chose, elles resteront juste en dessous du seuil de ce que je considère comme étant l'intolérable.

J'avais encore bien mal, nous sommes allés nous coucher, nous avons fait l'amour, j'avais encore bien mal, j'ai pris quelque chose contre le reflux gastro-oesophagien, j'ai essayé de lire un peu, mes yeux tombaient de fatigue, j'ai l'impression que l'alcool aide de ce point de vue, m'aide à me laisser envahir par la fatigue, depuis deux ou trois jours c'est comme ça en tout cas, C. m'a dit d'éteindre, j'avais peur de ne pas arriver à m'endormir, de me réveiller au milieu de la nuit avec une grosse crise, mais je me suis endormi, je ne me suis pas réveillé avant sept heures vingt ce matin, et curieusement j'avais moins mal en me réveillant que la veille, après ce malaise, je m'attendais à pire, maintenant je passe une matinée supportable, à part le fond d'angoisse, d'inquiétude pour l'avenir, évidemment, je me sens encore bien trop fragile, je ne sais pas ce qui va se passer en septembre.

La journée d'avant-hier (vendredi) s'est située un peu entre les deux. Pas mal de douleur le matin (mais pas autant que samedi), piscine à midi où je me suis senti bien et où j'ai du coup fait trente longueurs au lieu de vingt, peut-être que je n'aurais pas dû, en tout cas, repas et début d'après-midi correct, mais grosse douleur au bas du dos à quatre heures, peut-être à cause de l'effort à la piscine, là encore, j'ai essayé de supporter, j'ai fait le repas, on a mangé, c'est un peu passé, on est allé se coucher et je n'ai pas trop mal dormi.

J'ai commencé à prendre ce produit, cette poudre verte recommandée par notre charpentier, Barleygreen, ça s'appelle, c'est peut-être complètement idiot, mais honnêtement, je n'ai pas grand-chose à perdre, ça semble assez inoffensif, je commence doucement avec une petite dose, on va bien voir, au pire ça ne fera rien et j'arrêterai et ça m'aura coûté 50 $, pas la fin du monde. Ça a tellement soulagé son mal de dos à lui, il était tellement détruit par les anti-inflammatoires qu'il pensait qu'il allait mourir, ça lui a sauvé la vie et je le vois travailler, monter sur les échafaudages, sur le toit, à 57 ans, avec sa spondylarthrite ankylosante, c'est incroyable, je me dis, purée, puisque la médecine conventionnelle n'a de toute façon aucune solution pour ce type de problème, aucun remède, qu'est-ce que j'ai à perdre ?

Si le produit était nocif, j'en trouverais des indications sur Internet, je suppose. Pour le moment, je ne trouve que des témoignages plus ou moins convaincants de gens pour qui ça marche, y compris des gens souffrant de fibromyalgie, à savoir une forme de syndrome très voisine de ce dont je suis censé souffrir (douleurs myo-fasciales). Certes, il y a un peu trop de « hallelujah » et autres références bibliques dans ces pages à mon goût, mais mon scepticisme ne date pas d'aujourd'hui. Je vais essayer pendant quelques semaines, pourvu que ça n'irrite pas mon intestin — et on verra bien.

Fin de semaine calme, sans travail à faire, avec quelques éclaircies pour donner envie de se donner au soleil. Journée idéale pour essayer de se reconstruire un peu plus en prévision de la prochaine crise, qui devra être moins forte que la précédente. C'est la seule façon dont je me vois sortir de tout cela. Et il me reste deux ou trois semaines pour faire quelques grands pas dans cette direction.

Z - Days 27 to 29 Z - Days 33 & 34

© 2000 Pierre Igot

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