OBJECTIF


La maladie ne nourrit pas l'art ; elle le remplace. Il faut — au nom de rien — se défaire de ce soupçon qu'elle y aurait apporté quelque chose, qu'elle pourrait encore le faire. C'est un bien mauvais calcul. La maladie n'est bonne (excellente même) qu'à l'état non déclaré — presque insoupçonnée. Or ça ne dure jamais. La maladie n'est donc bonne qu'à apprendre. À ensevelir ou à disparaître. Il n'y a pas de stabilité entre les pôles. Il n'y a que des jeux fous d'espoir, naïfs, subtils et déroutants — mais pas pour longtemps. Tôt ou tard, la maladie vous rattrape, par son existence ou par son absence. Et les conséquences s'en tirent toutes seules, avant que vous ayez eu mot à dire.

Après, c'est un jeu puéril avec le feu, un corps en exil, des ressorts sous l'air praticable que prend la voie vers d'autres chances. Qui ralentissent et engourdissent. Qui font office de mouvement quand le but se casse. Ce qui arrive à l'envers de tous les jours blancs. Tous les soirs, dès qu'un nom s'efface.

La maladie ne nourrit pas l'art ; elle le nettoie.

Je voudrais épuiser tous les symptômes.


© 1997 Pierre Igot

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